Fermez les yeux et pensez à un volcan. Nul doute, sans le savoir, c’est le Mont Taranaki qui viendra à l’esprit. Un cône parfait, s’élevant d’une plaine, à peine vallonnée et verdoyante, jusqu’au cieux, la tête dans les nuages. Imposant, impressionnant mais aussi tellement attirant.

Plus qu’une ascension, le gravir représente une véritable expérience. Les jambes, les bras…  le corps dans son intégralité mais aussi l’esprit sont alors soumis à rude épreuve pour atteindre ce cratère, bouché par les neiges éternelles, à 2518m d’altitude*.

Pour s’attaquer à ce kilomètre et demi de dénivelé, mieux vaut s’aider de la faible visibilité offerte par la nuit. Sous les étoiles et une faible lune, le large chemin aux côtes infernales conduisant jusqu’au lodge, dernier vestige de présence humaine, se montre bien moins rude. Avec les premiers rayons du soleil, le décors change. L’étroit sentier remplace la large voie et bientôt, les rochers viennent encombrer l’intégralité du passage. A chaque étape, le jour un peu plus clair dévoile un nouveau décors. Après avoir serpenté parmi les éboulis de roches au creux d’un vallon puis franchis les centaines de marches en bois d’un escalier paraissant conduire jusqu’au cieux, fini de rigoler. Le plus dur reste à venir.

A droite, à gauche : plus rien. Les quelques touffes d’herbes, coincées étonnement dans  ce désert gris de pierres, et perlées de rosée matinale ont désormais disparu du paysage. Ici, les rochers sont devenus gravier, voir sable. Large, glissante, poussiéreuse, épuisante cette piste semble sans trêve, à perte de vue. Le moindre rocher paraissant plus solidement accroché offre un instant de pause, mais très vite il se décroche sous le poids et dévale la pente à toute vitesse. Gare aux randonneurs précédent comme au suivant.

Enfin, ce désert de sable volcanique prend fin, aussi soudainement qu’il avait commencé. Les blocs de roches argentés aussi fins et tranchant que du verre emplissent maintenant ce paysage lunaire. Crapahutage, escalade : pas de répit pour les braves ! Les gants se montrent bien utiles, non pas pour réchauffer les doigts à cette altitude pourtant blanchies par quelques nappes de neige glacée, mais plutôt pour protéger les mains des écorchures promises par les rochers à surmonter. Avec la fatigue, le sommet semble inaccessible et pourtant cette dernière heure éprouvante touche à sa fin. Après avoir traversé le cratère glissant d’une lourde couche de glace, voilà l’ultime ascension. Depuis ce perchoir argenté, les randonneurs ont comme le monde à leur pied. La mer au sud comme à l’ouest, les immenses plateaux de verdure tout autour et au nord, sortis d’une mer de nuages cotonneux, les sommets du Parc National du Tongariro, s’irisent des roses couleurs matinales. Le toit du monde… enfin de l’ile du Nord de la Nouvelle-Zélande. Le paysage est à la hauteur de l’effort enduré. Une heure, deux heures… tant que le soleil brille et que les nuages glissent autour du volcan sans en atteindre le sommet, il est difficile de lâcher l’horizon du regard pour songer à quitter ce promontoire d’exception. Et pourtant, il faut bien redescendre sur terre.

Le même chemin, les même rudes étapes : l’escalade entre les roches, la longue pente de gravillon où l’on se laisse volontiers glisser sur les fesses pour éviter la chute, puis viennent les escaliers, les gravats amoncelés des probables précédents éboulis et enfin le large chemin. Si au kilomètre 0 le soleil brille toujours au cœur d’un ciel azur, la haut, le sommet s’est de nouveau drapé dans son nuage blanc. Rideau, fin du spectacle. Le soir venu, comme épuisé par le passage de tous ses randonneurs assoiffés d’altitudes, le Mont Taranaki s’endors caché… pour mieux éblouir les prochains au matin.

 

 

*Attention, pendant les mois d’hiver, mieux vaut se renseigner auprès du I-site concernant les conditions climatiques avant de se lancer à l’aventure sur le Mont Tongariro. Des équipements seront fort probablement nécessaire afin de gravir les rochers glacés et enneigés.

 

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